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La vitamine B17 (Laetrile) permet-elle de guérir du cancer ?

Dernière mise à jour : 2 mai 2022


amandes en vrac dans un petit sachet en plastique blanc

La vitamine B17 est vue comme un traitement contre le cancer par certains.

La guérison du cancer est complexe et les cures de vitamine B17 sont des "alternatives" à la chimiothérapie qui sont proposées parmi tant d'autres.

Nous allons donc voir aujourd'hui si il est vraiment raisonnable d'envisager un tel traitement et nous allons également évoquer les bienfaits généraux que peut avoir (ou ne pas avoir) cette vitamine.


Qu'est-ce que la vitamine B17 ?

La vitamine B17, également appelée amygdaloside ou amygdaline, a été découverte il y a maintenant près de deux siècles dans les amandes amères par deux scientifiques français : Pierre-Jean Robiquet et Antoine-François Charlard.

Cette substance se fait aussi appelée laetrile lorsqu'elle se présente sous une forme légèrement modifiée.


La laetrile est un composé organique dérivé de l’amygdaline, cette substance n'est pas à proprement parler une vitamine puisqu'elle n'est pas essentielle au bon fonctionnement du corps humain, mais elle a historiquement été labellisée ainsi de manière erronée.

Cette substance est composée de trois éléments liés principaux : le glucose, le benzaldéhyde et le cyanure d’hydrogène.


À l’état naturel, on la retrouve surtout dans les amandes amères, les noyaux d’abricots et les noyaux de fruits de manière générale.

On la retrouve par exemple dans les noyaux de pêches, de cerises, de pommes, de prunes, de nectarines, ainsi que dans les noix de cajou.


Pourquoi cette substance est évoquée dans la lutte contre le cancer ?

Il y a différentes théories plus ou moins sérieuses qui amènent des personnes à penser que la "vitamine B17" pourrait aider dans la lutte contre le cancer.

La première et la plus célèbre est que les cellules cancéreuses possèdent plus de béta-glucosidase et moins de rhodanèse que les cellules saines.

cellules et vaisseaux du corps humain de couleur rouge et violette

Ces deux principes actifs sont des enzymes qui sont impliqués dans différentes réactions chimiques dans l'organisme humain.

La théorie est donc que ces deux enzymes convertiraient l'amygdaline en cyanure toxique dont elles seraient moins à même de se débarrasser, ce qui permettrait un effet "sélectif" de la toxicité de l'amygdaline.


Toutefois, aucune différence significative de concentration en β-glucosidase et en rhodanèse n'a jamais été observé entre les tissus sains et les tissus tumoraux.

La deuxième grande théorie est que le cancer serait une "maladie métabolique" due à un manque de vitamines, et en particulier de vitamine B17…

Encore une fois, aucun fait solide ne vient confirmer cette idée mais elle fait son chemin depuis un bout de temps.


Comme souvent, l'engouement pour ce "remède naturel" est né aux Etats-Unis.

La laétrile aurait été synthétisée en 1945 par Ernst T. Krebs Jr (un faux docteur reconnu comme un escroc), il a ensuite repris une théorie du début du siècle sur le développement des cancers et sur les bienfaits du cyanure, qui pourrait tuer les cellules cancéreuses. Aucune étude scientifique ne valide clairement cette théorie, mais ce traitement a tout de même été légalisé dans 27 états sur 50 aux Etats-Unis dans les années 70. Plus de 75 000 Américains atteints d'un cancer ont donc pris de la laétrile au début des années 70.


Le gouvernement fédéral américain a fini par interdire la vente de laétrile quelques années plus tard compte tenu des risques et de l'absence de preuve formelle de l'efficacité du traitement.

Certaines familles ont toutefois fait valoir en justice le stade terminal des patients et leur liberté de choix.

infirmier conduit un chariot dans un hôpital avec deux autres infirmières en face de lui

Ils ont donc obtenu l'accès à cette substance, qui a été requalifiée en vitamine.

La dimension populaire de ce traitement a poussé les autorités sanitaires américaines à lancer une étude rétrospective sur les données de patients ayant pris cette substance. Cette étude n'est pas significative car seuls 68 cas ont été analysés.


Il n'y avait en plus aucune connaissance du contexte (traitements antérieurs, autres facteurs de risque).

Les auteurs sont arrivés à la conclusion qu'il n'y avait aucune preuve d'efficacité anti-cancéreuse mais le manque de rigueur scientifique n'a pas convaincu ceux qui croyaient en l'efficacité de la vitamine B17. Un an plus tard, le décès de Steve McQueen, un acteur très populaire qui est décédé rapidement après un traitement à base de laétrile, a fait perdre en popularité à cette substance. Son cancer était toutefois diagnostiqué comme incurable par les médecins, il n'est pas possible de savoir exactitude ce qui a causé sa mort.

Il est décédé d'un arrêt cardiaque pendant une énième opération en novembre 1980. La longue enquête sur la vitamine B17 a ensuite continué, le National Cancer Institute (NCI) a lancé en 1982 un essai clinique auprès de 178 patients atteints d'une tumeur d'au moins 5 cm (ou d'un foie métastique) sans métastases osseuses mais incurable avec les traitements de l'époque.


Un tiers des patients n'avaient encore jamais reçu aucune chimiothérapie au moment de démarrer l'étude.

Ils ont donc reçu de l'amygdaline par voie intraveineuse et orale à des doses quotidiennes de 4,5 grammes d'amygdaline par mètre carré de surface corporelle, soit environ 7,7 grammes par jour, une dose conforme aux pratiques de l'époque (mais qu'on sait aujourd'hui très dangereuse).

médecin utilise une seringue avec des gants blancs dans un laboratoire

Cela a été complété par des enzymes pancréatiques, des vitamines et un régime méditerranéen.

D'après les résultats de cet essai, publiés dans le NEJM (New England Journal of Medecine), "aucun bénéfice notable n'a été observé en termes de guérison, d'amélioration ou de stabilisation du cancer, d'amélioration des symptômes liés au cancer ou d'allongement de la durée de vie" chez ces patients.


Un seul patient semble répondre "partiellement et transitoirement" au traitement avant de finalement décéder, 158 patients décèdent dans les 5 mois, un délai conforme à celui des maladies lorsqu'elles ne sont pas traitées.